ANNE SOL GAULIER

« See how strange, how sad, familiar things may be.… » M. Lowry

Au début du deuxième confinement, j’écoutais et lisais toutes les informations relatives à cette maladie due au virus corona.

J’ai vite compris que cela ne m’aidait pas.  Ces informations en continu, alors que nous étions tous en apnée au fond de nos maisons, m’angoissaient. M’embrouillaient.

À côté de chez moi, il y a la forêt  de Fontainebleau. Elle si belle, royale. J’ai décidé de partir en promenade, tous les jours, avec mon appareil photo. Ces longues marches m’ont apporté une telle clarté de pensée qu’elle a réveillé le souvenir de mes promenades d’enfance, dans les forêts mystérieuses du Berry,  la main cachée dans celle de mon grand-père. Je me souviens comment il m’apprenait « à voir », à sentir, à écouter.

C’est une fête funèbre en plein soleil commence à cet instant, où au creux d’un fossé empli de colchiques,  nous avions découvert un renard agonisant. 

Covid-19 m’a poussée au fond des bois. J’ai commencé à rédiger un journal, à accumuler des images croisées lors de mes errances.

Mes photographies sont devenues lentes, sans bruit. Elles parlent de silence, immobilité, de patience, d’attente. Ce sont des scènes qui se taisent dans un temps suspendu, où l’humanité est absente. Il ne faut pas forcément s’éloigner géographiquement pour découvrir une réalité différente, plus dense, plus belle, quand tout est question de délicatesse, d’approche précautionneuse. 

Un écart entre le mystère et une simplicité apparente.

Au-delà des bois, les rues sont presque vides, les rideaux de fer baissés, les visages masqués. 

Le soleil est là, c’est une fête funèbre en plein soleil.

(série de 30 photographies format 30 x 45).